Retenons notre respiration, nous sommes le 28 septembre… retenons notre souffle, et nouons les bras sur nos têtes. Les bourreaux rouges sont assoiffés de sang. Ils violent, ils tirent, ils tuent, ils brûlent tout sur leur passage. C’est l’enfer dans le stade et il n’y a aucune issue qui mène au ciel…

« Fâbêêê »!

Leurs détonations déchirent le silence du désert. En cette journée dite de fierté nationale, des balles arrêtent et rompent des vies. Dans un sang-froid glacial, des hommes effacent et anéantissent des existences. De leur feu, les vitalités, les projets, et les aspirations d’une jeunesse se dissipent et s’estompent comme le brouillard des matinées d’hiver. De leurs gestes, de leurs cœurs durs comme de l’acier, ils jettent à jamais des pères et des mères, des sœurs et des amis, dans les pleurs. Ils mettent la Guinée dans les profondeurs de l’horreur et de la terreur. De leurs agissements, ils rappellent l’horreur, la sauvagerie et la cruauté du passé.

Une matinée, un jour, un instant…Ils sèment à jamais dans les cœurs de milliers de familles, la douleur et l’amertume. Dans la poussière, dans le sang, et en plein jour, des femmes sont violées et des jeunes sont morts sans savoir pourquoi !

Vous étiez sortis désarmés. NON, PARDON. Vous étiez juste armés de votre courage et de votre amour pour la Guinée, pour la liberté et pour la démocratie. Comme tous les guinéens vous êtes sortis exprimer votre mécontentement et votre ras-le-bol. Comme tout guinéen ce jour là, vous êtes sortis dire « trop, c’est trop », dire « assez la démagogie » et « assez l’arbitraire ». Comme tout Guinéen, ce jour-là, nous avons voulu exiger le respect de la parole donnée et des engagements pris devant le monde entier.

Entre les pleurs, dans les mains des parents et des proches, dans la tristesse d’une nation, dans la détresse d’un pays, la compassion d’un continent et la consternation de l’humanité toute entière, vous êtes partis. Vous êtes morts mais plus que jamais vous êtes présents dans nos cœurs et dans nos âmes. Au fond de vos tombes, dans cette demeure, vous avez quitté ce bas-monde sans avoir eu le temps de découvrir les visages de vos tueurs. La vague d’horreur vous a emporté sans raison.

Comme dans le passé, les bourreaux ont ôté des vies, ils ont brisé des cœurs, sans gêne… Comme dans le passé, comme avant-hier, en juin 2006, comme hier le 22 janvier 2007, comme aujourd’hui le 28 septembre, les bourreaux avaient reçu l’ordre d’en haut. Comme hier, ils avaient leurs propres critères de choix. Ils ont violé les mères, les sœurs et filles des autres. Ils ont visé et tiré. Ils ont poignardé, Comme hier… Comme dans l’ancien régime…des corps ont été soustraits, jetés dans la mer, ou enterrés dans des fosses communes, comme à Nongo, à Télimilé, à Kankan, au Camp Boiro. Ils ont méthodiquement tué, et ont voulu effacer toute trace.

Chers martyrs, vous êtes partis mais vos assassins courent toujours, plus que jamais rassurés, plus que jamais contents. Un an après, ils marchent, la poitrine bombée et les épaules hautes, sur le sol Guinéen où ils ont semé vos corps. Après avoir massacré les enfants des autres, ils s’occupent et s’activent et font tout pour protéger les leurs sous les arbres qu’ils ont arrosés par vos sangs.

Sans honte, sans remords, ils s’abritent sous le ciel Guinéen, en dessous duquel flottent vos âmes.

Le soleil se lève, les jours se suivent, se succèdent et se ressemblent. Les horizons sont sombres, le ciel est désert, les mêmes vents brûlent toujours les cœurs.

Ah ! Les escadrons de la mort, les vampires de la vie, continuent de commettre et d’encourager la barbarie à l’encontre de la nation guinéenne. Au moment où, sous d’autres cieux, l’humanité toute entière s’agenouille et implore le pardon à d’autres hommes victimes de la cruauté de ses semblables, cette autre Guinée n’a éprouvé aucun remord, aucune gêne et aucune inquiétude face aux événements de l’histoire. Dans chaque pas de leur vie, nos dirigeants s’activent pleinement, aidés par des militaires qui n’ont jamais connu le sens du patriotisme. Épaulés par des policiers et gendarmes criminels, nos dirigeants enrichissent la culture de la haine, la civilisation du mépris des valeurs humaines et l’éducation de la différence.

Ces partisans de cette hégémonie barbare, qui se maintient par des assassinats, savent-ils que la mort n’est point absurde ? Savent-ils que c’est l’acte qui fonde le geste du tueur qui est vraiment absurde ? Car, la mort, en soi, est une source de sens et de signification. Elle pousse à l’interrogation, elle nous fait découvrir les limites de nos possibilités. Elle révèle notre être fini dans l’infini de l’être.

La vie de ces martyrs fut courte mais combattante. Leur mort fut douloureuse mais héroïque, leur sacrifice est sacré et leur mémoire sera éternelle.

Pour l’intérêt de notre peuple et de la nation toute entière, il est impératif que chaque citoyen s’oppose de toutes ses forces, pour arrêter la programmation, la réalisation et la répétition d’un 22 janvier 2007 ou d’un 28 septembre 2009. Le peuple de Guinée a trop souffert, et souffre encore des “dérives” préméditées, des idéologies génocidaires et des actions meurtrières. Aujourd’hui, dans nos âmes gît la souffrance, la douleur, et le désespoir. On ne ressent plus les joies de la vie, on ne jouit plus des plaisirs de l’existence.

L’oppression dans toutes ses formes doit cesser maintenant et tout de suite. Le Guinéen veut vivre dignement, travailler ardemment pour développer son pays et mériter le respect des autres nations dans la démocratie et dans le droit.

Oui ! C’est ce que veut l’immense majorité des Guinéens. Ceux qui veulent empêcher cela auront des comptes à rendre. Ils auront des comptes à rendre devant la Guinée et les guinéens, devant l’histoire et devant toute l’humanité. Ceux qui ont versé le sang des guinéens auront des comptes à rendre, que ça soit ici ou là-bas. Mais, ils rendront des comptes. Ceux qui ont aidé ou ont donné des ordres pour massacrer les filles et fils de la Guinée auront des comptes à rendre. Ceux qui veillent à la protection de leurs propres enfants et assassinent les enfants des autres rendront des comptes. Ceux qui ont recruté des loubards, des voyous, et les ont intégré au sein de l’armée guinéenne, au sein de la police et de la gendarmerie nationale pour tuer les enfants guinéens auront des comptes à rendre.

Les responsables de près ou de loin de la tuerie du 22 janvier 2007, du 28 septembre 2009, répondront de leurs actes. Et ils auront la peine que mérite l’assassin d’un enfant guinéen.

Les coupables des massacres et des atrocités de juin 2006, janvier et février 2007 et du 28 septembre 2009 ; les coupables des massacres d’avant ou après ces périodes seront châtiés, ils seront humiliés. Nos enfants, nos frères et sœurs, nos fils et filles seront par la justice vengés.

Ceux qui se sont installés à leur place grâce au peuple et pour le peuple et qui ont oublié cela auront aussi des comptes à rendre.

Au lendemain du carnage de janvier et février, comme au lendemain du massacre du 28 septembre, des personnes que nous pensions être de patriotes ont été choisies pour cesser les larmes, rendre justice et diriger des gouvernements de consensus. Ils ont trahi la confiance et l’espoir placés en eux. Ils ont choisi de travailler pour leurs propres intérêts, au lieu de travailler pour le peuple qui s’est battu pour qu’ils soient là où ils sont. Ils ont promis et n’ont pas tenu leur promesse, ils se sont volontairement détournés de leur feuille de route. Ils ont dit et ils ont menti. Ils rendront des comptes devant ce peuple.

Ceux qui dilapident, pillent et volent le peuple, ceux qui corrompent, répondront tous devant la justice. Ils seront jugés et auront le châtiment qu’ils méritent. Ceux qui s’activent pour diviser les enfants du pays, ceux qui anéantissent les acquis, ceux qui montent les fils de la Guinée les uns contre les autres, auront des comptes à rendre.

Du général au caporal, du Président au chef de quartier, tous ceux qui ont du sang sur leurs mains seront arrêtés. Sur leur ordre et par leurs gâchettes les guinéens sont tombés, le jour viendra où ils rendront des comptes.

Ils ont choisi de se servir et servir un individu au lieu de servir la nation. Le peuple les observe. Le moment venu, la loi sera appliquée, ils seront sévèrement punis. Les guinéens qu’ils ont tués seront par la justice vengés. Où qu’ils soient, sous ciel ou dans la terre, ils ne sont pas invulnérables. Le peuple les guette. Le moment venu, la loi sera appliquée, ils seront sévèrement punis. Les Guinéens qu’ils ont tués seront par la justice vengés. Comme disait Bill de Sam dans une de ses chansons : « …il faut qu’on vous traine devant les tribunaux il faut que vous répondiez à tous ces maux, il faut qu’on vous condamne….. ». Tous ceux qui ont fait du mal à notre chère Guinée seront punis. Les coupables sont connus et les victimes sont connues, tôt ou tard justice sera rendue.

Je le dis encore, la vie de ces martyrs fut courte mais combattante, leur mort fut douloureuse mais héroïque, leur sacrifice est sacré, et leur mémoire sera éternelle.

Pour ne pas que leur mort soit vaine, il est impératif que chaque guinéen digne de ce nom, homme, femme, enfant, adulte et vieux, vivant à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, continue de participer activement à cette lutte digne que ces jeunes ont entamés. C’est une lutte noble, digne et vitale, sans laquelle il n y aura pas une existence réelle et heureuse, sans laquelle il n’y a ni liberté, ni justice et ni égalité. Sans laquelle il n’y a ni respect, ni essence de vie et ni valeur humaine.

Plus que jamais la lutte doit continuer pour la démocratisation de notre pays, plus que jamais la victoire est proche.

Les brises matinales du printemps ont fait souffler les vents du changement. C’est l’aurore! C’est l’aube ! Les rayons du soleil ont fait briller les lueurs d’espoir…

Par Tidiane Maloun BARRY, Paris, France